Depuis septembre 2020, les 12 « Monnaies Locales Complémentaires Citoyennes » (MLCC) de Bretagne réfléchissent à la création d’une monnaie commune.  C’est en décembre 2020 que l’annonce a été confirmée. Pour ses responsables, « l’objectif est, tout en conservant leur identité propre sur chacun de leurs territoires, de créer une MLCC bretonne qui pourra être utilisée dans tous les bassins de vie de la Région par les acteurs économiques : particuliers, entreprises, associations, collectivités et tous les partenaires adhérant à chacune de ces monnaies ».  Le projet devrait se concrétiser en 2021.

L’enjeu est assez conséquent. Les monnaies locales bretonnes représentent déjà 300 000 euros en circulation sur la Bretagne. Ce sont 6000 acteurs économiques, dont un millier d’entreprises adhérentes.

Chaque monnaie locale crée localement 3 à 7 fois plus de richesses que les euros, notamment en raison des processus circulaires et renforcés de circulation. Notons également que l’activité locale a ses avantages pour les habitants des territoires concernés : une consommation plus raisonnée, davantage d’investissements éthiques et enfin davantage de résiliences aux crises économiques, sociales et sanitaires. Effectivement, comme indiqué dans le communiqué, les euros échangés en monnaies locales sont déposés en garantie dans des banques éthiques : NEF et Crédit Coopératif, qui favorisent l’investissement dans l’économie sociale et responsable.

Les monnaies locales, c’est aussi le renouvellement d’une culture de pays, si chère à l’ensemble de la Bretagne. L’ancrage est fort, historique et cohérent au moment où, dans l’indifférence générale, la Région semble délaisser cet échelon des pays. Les territoires des cinq départements engagés dans cette dynamique économique, solidaire et durable sont plus à l’échelle des pays vécus (le pays de Brest, de Ploërmel, etc.) qu’issus de découpages institutionnels ou politiques. Cette répartition des monnaies locales à l’échelle des lieux de vie est sans doute aussi la raison de leurs succès.

Parmi les 12 monnaies locales, 8 d’entre elles sont déjà engagées : le Segal dans le Pays de Lorient, l’Ourse du Pays de Questembert à celui de Férel, La Maillette du Pays de Rance, Heol dans le Pays de Brest, Le Galleco du Pays de Rennes au Pays de Redon, Le Galais dans le Pays de Ploërmel, Le Buzuk dans le Pays de Morlaix et La Bizh dans le Pays de Vannes. Le Bif (projet de MLCC de Belle-Ile) a également signé son accord de partager la MLCC commune. 3 autres MLCC sont toujours en cours de réflexion pour rejoindre la dynamique : le Moneko en Loire-Atlantique (issue déjà d’une fusion entre Retz’l et SoNantes), le Rozo dans le Pays de Saint-Nazaire et Le Pezh du Trégor-Goëlo. La mutualisation souple de certaines démarches (promotion par exemple), de nouveaux partenariats régionaux, les échanges de bonnes pratiques ainsi que la fertilisation de certaines actions peuvent donner un véritable coup d’accélérateur à ces initiatives d’avenir qui ont déjà fait leurs preuves à l’échelle locale. Et si la Bretagne créait sa propre monnaie de solidarité ?

Camille Le Strat

Bretagne Prospective